La notion de parasitisme
En droit français, le parasitisme est une catégorie appartenant à la concurrence déloyale.
Il s’agit, pour une entreprise, de tirer profit des investissements ou de la notoriété d’une autre entreprise. En d’autres termes, cela correspond, aux yeux de la Cour de cassation, à usurper la notoriété, le savoir-faire et les efforts tant intellectuels que financiers d’une société. Selon Louis VOGEL, ancien président de l’Université Panthéon-Assas, il s'agit de la reprise des éléments qui ont contribués à la réussite de l'entreprise pour en profiter sans les moindres efforts financiers, intellectuels, ou promotionnels.
Cela permet à l'entreprise parasite de se placer dans le sillage d'une autre entreprise et de réaliser des gains illégaux tout en faisant des économies sur ses propres investissements.
L'usurpation de cette valeur économique est contraire à la morale des affaires, que l'entreprise soit concurrente ou non. Au nom de la liberté du commerce et de l'industrie, la recherche de profits au détriment d'une autre entreprise n'est pas en soi une pratique relevant de la concurrence déloyale. Elle le devient lorsque qu'il existe un risque de confusion dans l'esprit des clients quant à l'origine des produits.
De plus, il est important de préciser que le parasitisme est une notion jurisprudentielle englobant davantage les aspects économiques du marché plutôt que la protection des consommateurs.
Qualifié de concurrence déloyale en droit commercial et en droit de la concurrence, le parasitisme se divise en deux types de comportements. Le premier est le fait d'usurper le travail d'une autre entreprise (savoir faire, apport intellectuel...) , et le deuxième correspond à l'usurpation de sa notoriété (nom commercial, nom de domaine...).
Les investissements et la notoriété méritent alors d'être protégés car ils constituent une réelle valeur économique. L'action en concurrence déloyale va permettre aux entreprises de se défendre, et l'existence d'une concurrence entre les protagonistes est indifférente au déclenchement de cette action.
Comment prouver le parasitisme ?
L'action en concurrence déloyale ou parasitaire trouve son fondement dans le droit commun de la responsabilité délictuelle prévue par les articles 1240 et 1241 du Code civil. Ainsi, il existe trois conditions cumulatives pour retenir cette responsabilité et constater l'existence d'un trouble commercial :
- Une faute commise par un agent économique, intentionnelle ou non. Il s'agit d'un comportement contraire aux lois et aux usages. Dans le cadre du parasitisme, il faut prouver que l'entreprise parasite s'est servie de manière lucrative et injustifiée, de la valeur économique d'une autre entreprise.
- Un préjudice subi par une autre entreprise, concurrente ou non. Il est notamment caractérisé par une perte de clientèle et donc la baisse du chiffre d'affaires, par la perte des salariés, un gain manqué ou un préjudice moral.
- Un lien de causalité entre la faute et le préjudice. ce lien est souvent présumé, car le préjudice vient se déduire de la faute.
Quels sont les actes de concurrence déloyale ?
En plus du parasitisme, il existe plusieurs fautes constitutives de la concurrence déloyale qui sont souvent constatées par la jurisprudence. Il s'agit du dénigrement, de la confusion et de la désorganisation.
En quelques mots, le dénigrement est le fait de discréditer une autre entreprise en critiquant les produits et les services qu'elle propose.
La confusion est le fait d'induire en erreur les consommateurs, qui vont être amenés à confondre une marque avec une autre. Il s'agit par exemple de copier la carte d'un institut de beauté concurrent.
La désorganisation consiste à toucher l'organisation d'une entreprise concurrente. Il s'agit notamment du débauchage de ses salariés, ou le fait pour une entreprise d'utiliser des méthodes de vente illégales.
Exemples de parasitisme en droit de la concurrence
Voici quelques illustrations d'actes de parasitisme qu'ont pu observer les juges :
- La reproduction d'un slogan publicitaire (TGI Paris, 10 mars 1993)
- L'utilisation du terme Champagne pour désigner un parfum (CA Paris, 15 décembre 1993)
- La reproduction d'un code couleur. un fabricant de cartes routières a repris les couleurs et les conceptions utilisées par un concurrent.
- La reproduction de la fragrance d'un parfum (Cass. Com., 18 avril 2000)
- La reproduction du concept d'une émission de télévision
- La reproduction d'un site internet en copiant l'agencement du contenu et la structure (CA Paris, 7/09/2015)
- La copie des emballages et formes de produits
- L'Affaire Christian Louboutin contre Zara : Zara a volontairement créé une confusion entre les deux marques en utilisant la semelle rouge sur ses produits afin d'en tirer profit.
Le parasitisme et les droits de propriété intellectuelle
Définitions
La contrefaçon est une reproduction, une représentation d'une oeuvre de l'esprit sans autorisation de la part de l'auteur. Il s'agit alors d'une violation des droits de l'auteur, qui sont ses droits moraux et patrimoniaux. La faute n'a pas à être obligatoirement caractérisée pour qu'il y ait une contrefaçon, la copie suffit. C'est ce qu'il ressort d'un jugement du TGI de Paris en 2009 qui avait opposé la marque Christian Dior à Ebay. L'action en parasitisme, elle, repose sur une logique non personnelle mais plus économique et nécessite la présence d'une faute et d'un préjudice.
Sur le terrain de la contrefaçon, la jurisprudence sanctionne notamment la reproduction de photographies sur internet sans autorisation préalable de l'auteur (CA Amiens, 14 oct. 2004, Chantilly Séminaire c/ CCI Oise, Juris-Data n°258379).
La protection des droits d'auteur peut alors se faire sur le fondement de la contrefaçon, mais également du parasitisme. Cependant, les juges de la Cour de cassation précisent qu'un même fait ne peut pas être sanctionné sur deux fondements différents. Ainsi, le requérant devra choisir l'action qu'il voudra intenter en justice. S'il veut intenter une action en contrefaçon ainsi qu'une action basée sur le parasitisme, alors il devra invoquer des faits distincts.
Enfin afin d'éviter les contraintes liées à la compétence territoriale de l'action en contrefaçon, il peut notamment être plus judicieux de se placer sur le terrain du parasitisme dans certaines situations. De plus, le parasitisme peut être invoqué en dehors de toute protection de l'oeuvre. En définitive, chacune de ces procédures présentent à elles deux des avantages et inconvénients.
Les sanctions applicables
Concernant l'action en contrefaçon
Concernant les sanctions pour contrefaçon, il s'agit d'un délit réprimé par le Code de la propriété intellectuelle, sur le plan pénal et civil.
Au niveau pénal, ce sont les articles L335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle qui viennent s'appliquer pour sanctionner la contrefaçon. La peine prévue est de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende. Les peines sont portées à 5 ans d'emprisonnement et 500 000 euros d'amende lorsque les délits prévus par ces articles ont été commis en bande organisée.
Sur le plan civil, ce sont les articles 1240 et 1240 du code civil relatifs à la responsabilité civile de droit commun qui s'appliquent. Le défendeur pourra être condamné à payer des dommages et intérêts sur ce fondement afin de réparer le préjudice par la partie lésée. Le juge peut également confisquer au contrefacteur les bénéfices engendrés par la contrefaçon et faire publier le jugement.
Concernant la compétence territoriale, tous les Tribunaux de grande instance ne sont pas compétents en matière de propriété intellectuelle. Les tribunaux compétents sont les tribunaux de grande instance de Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nanterre, Nancy, Paris, Rennes et Fort-de-France.
Concernant l'action pour parasitisme
En ce qui concerne le parasitisme, les juges peuvent, en plus d'imposer le paiement de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, ordonner à l'entreprise parasite de cesser les agissements déloyaux. Ces mesures peuvent être assorties d'astreintes afin de dissuader le parasite de recommencer. Le montant est évalué en fonction de la gravité du préjudice subi en fonction des bénéfices ou des économies réalisés par le parasite, ainsi que le chiffre d'affaires de l'entreprise victime. La publication du jugement peut également être ordonnée par le juge.
Pour finir, l'article 46 du Code de procédure civile prévoit que la compétence territoriale est au choix du demandeur. Il s'agit de la juridiction du lieu où demeure le défendeur, celle où s'est produit le fait dommageable, ou encore celle où le dommage a été subi.